Messe de l’Assomption aux intentions de la France (Ain Saadé, 15 août 2010)

M. Didier Chabert, chargé d’affaires a.i., à la tête d’une délégation de l’ambassade de France au Liban, a assisté à la messe du 15 août, célébrée aux intentions de la France par Mgr Paul Matar, archevêque maronite de Beyrouth, en sa résidence d’été de Ain Saadé. Il y a prononcé le discours suivant :

Monseigneur,
Messeigneurs,
Messieurs les Députés,
Monsieur le Ministre,
Révérends Pères,
Mesdames, Messieurs,
Chers amis,

Cette célébration de l’Assomption, occasion de cette messe célébrée aux intentions de la France, nous offre le cadre d’une nouvelle rencontre chaleureuse, profonde et d’un partage spirituel entre la communauté maronite et la France. Permettez-moi, Monseigneur, de vous exprimer le grand honneur et la joie que j’éprouve à vous retrouver à nouveau et à conduire ici la délégation française. Votre accueil, votre bienveillance à notre égard, les prières que vous venez d’élever aux intentions de la France nous touchent profondément et je vous en remercie de tout cœur.

Le choix de cette date du 15 août est éminemment symbolique pour nous Français. En d’autres temps, en 1638 précisément, le roi Louis XIII avait fait le vœu de consacrer la France à la vierge Marie, après qu’il eut un fils, le futur Louis XIV, celui là même qui quelques années plus tard renouvellera les capitulations signées entre François premier et Soliman le magnifique pour la protection des chrétiens d’Orient. Et le 15 août est ainsi demeuré jour de fête nationale en France jusqu’en 1880.

Nous sommes présents ici aujourd’hui non pour nous remémorer l’histoire de France mais bien pour témoigner de l’affection longue et profonde qui unit à travers le temps les peuples de France et du Liban dans toutes leurs composantes. Chacun connaît, au Liban comme en France, les liens historiques qui unissent nos deux pays. Chacun mesure aussi le rôle que joue la communauté maronite dans l’étroitesse de ces liens qui, depuis des siècles, n’ont jamais faibli.

La visite en France du 14 au 18 juin dernier de Sa Béatitude éminentissime, le Cardinal Nasrallah Boutros Sfeir, a témoigné de l’attachement de la France à l’Eglise maronite : Le Président de la République, les Présidents des Assemblées, le ministre des affaires étrangères et européennes ont apprécié de dialoguer avec le Patriarche dont les analyses sont reconnues et appréciées pour la sagesse. Au-delà de la confirmation de l’amitié indéfectible de la France et de la reconnaissance de son rôle personnel, le Patriarche a reçu un accueil chaleureux tant de la communauté libanaise que de la communauté chrétienne française.

Loin des aléas de la politique, notre relation s’est enracinée dans la langue française que nous avons en partage et que Votre église, votre communauté et vous-même, Monseigneur, défendez avec passion dans vos écoles et vos universités. Ces établissements sont pour notre langue et notre culture des foyers d’essor et d’excellence. Comme l’a rappelé le Président de la République, M. Nicolas Sarkozy au patriarche Nasrallah Boutros Sfeir, la France maintiendra son engagement en faveur de l’enseignement du français et en français au niveau scolaire et universitaire. Vous travaillez, Monseigneur, au dynamisme de l’enseignement de la langue française et en langue française et vous contribuez à ce que cette langue, porteuse de valeurs fondamentales, demeure une passerelle entre nos peuples et nos cultures.

La francophonie est bien vivante au Liban. Le Liban devrait être le premier Etat membre de l’organisation internationale de la francophonie à signer lors du sommet de Montreux en octobre prochain un pacte linguistique. Après le succès de « la France au Liban » et la tenue du séminaire régional des responsables de Campus France, l’agence chargée de la promotion de l’enseignement supérieur français, en présence du ministre de tutelle, M. Eric Besson, le salon du livre francophone témoignera de la vitalité et du rôle central du Liban dans l’organisation d’événements francophones de dimension internationale.

Monseigneur, le Liban a traversé depuis notre rencontre le 15 août 2009 une année riche d’événements. Son Excellence le Président du Conseil des ministres, M. Saad Hariri, a formé un gouvernement en novembre dernier et présenté une déclaration ministérielle adoptée par l’Assemblée nationale le 4 décembre dernier. Le gouvernement d’union nationale travaille depuis aux réformes nécessaires à la modernisation des infrastructures et de l’Etat libanais. Il a notamment, fait remarquable, approuvé un budget qui doit maintenant être adopté par l’Assemblée nationale. Le ministre de l’Intérieur, M. Zyad Baroud, a organisé, à nouveau avec succès, les élections municipales qui ont permis le renouvellement des instances locales dans la perspective maintenant d’une loi de décentralisation.

Ces nombreuses avancées, encore inimaginables il y a un an, sont assombries actuellement par le climat de défiance qui s’instaure autour du TSL. Je veux rappeler ici qu’une décision de la communauté internationale est la condition indispensable à la création de tribunaux internationaux – ce fut la résolution 1757 des Nations unies dans le cas du TSL -, ensuite ceux-ci deviennent des mécanismes indépendants, dont l’activité ne cesse qu’une fois la justice rendue. La France appelle donc toutes les parties libanaises au respect du travail de la justice dans l’établissement de la vérité, dans un esprit non-partisan de concorde et d’apaisement. Il appartient à tous d’y travailler sans stigmatisation réciproque mais au contraire dans un souci de responsabilité et d’intérêt national.

Sur le plan régional, la visite le 22 décembre 2009 du Président du Conseil des ministres à Damas, a ouvert la voie à l’établissement d’une relation institutionnalisée entre Damas et Beyrouth, qui s’est concrétisée le 18 juillet dernier par la visite du chef du gouvernement libanais, accompagné par 13 ministres à Damas, et la signature de 17 accords bilatéraux. La visite effectuée le 30 juillet à Beyrouth par le roi Abdallah d’Arabie saoudite et par le président syrien Bachar al-Assad a donné lieu à un sommet tripartite avec le Président Sleiman. Cette rencontre a constitué un symbole fort de mobilisation régionale en faveur de la stabilité du Liban. Ce sommet a été un indéniable succès pour le Président Sleiman et pour le Premier ministre. Le gouvernement d’union nationale en sort consolidé.

Après le grave incident d’Adayssé le 3 août dernier, je voudrais réaffirmer l’engagement de la France en faveur de la stabilité du Liban sud. Nous avons multiplié les contacts la semaine passée avec l’ensemble des parties, les invitant à faire preuve de responsabilité et au respect de la ligne bleue. Tout doit être fait pour éviter le renouvellement de tels incidents ainsi que toute escalade de la violence pouvant menacer la stabilité de la région. Tous nos efforts auprès des autorités libanaises et israéliennes vont dans ce sens. Nous attendons le rapport définitif de la FINUL dans les prochains jours qui permettra d’établir les responsabilités et de prendre les mesures adéquates.

Ce rapport sera publié quelques jours avant le débat au Conseil de Sécurité sur le renouvellement du mandat de la FINUL, dont la France demeure l’un des principaux contributeurs. Dans ce contexte je souhaite rappeler l’attachement de la France à la mise en œuvre pleine et entière de la résolution 1701. Je réitère notre condamnation de toutes les violations de la R. 1701 y compris des survols israéliens du territoire libanais et de l’occupation israélienne de la partie nord du village de Ghajar, mais aussi les incidents dont a été victime la FINUL en juin et en juillet dernier. Je le répète : le principe de la liberté de mouvement de la FINUL est nécessaire et indiscutable.

Dans ce contexte troublé, il est plus important que jamais de prendre toutes les mesures nécessaires pour rapprocher les différentes communautés libanaises autour d’un projet commun. Je connais vos efforts, ceux de la conférence des évêques et ceux de l’ensemble de l’Eglise maronite pour que ce « pays-message » comme l’avait qualifié le pape Jean-Paul II demeure l’exemple de la coexistence pacifique, qui fait toute sa singularité et sa richesse.

L’église maronite a ainsi toujours encouragé tous les protagonistes, quels qu’ils soient, à faire passer l’intérêt supérieur du Liban avant toute autre considération. Ce message de tolérance et de dignité, Monseigneur, vous l’avez répété à tous, au Liban et par delà ses frontières à sa très dynamique communauté maronite.

Je saisis l’occasion qui m’est donnée aujourd’hui pour rappeler le soutien de la France au Président de la République, M. Michel Sleiman, et à l’ensemble des institutions libanaises. Ce soutien a été marqué politiquement depuis le début de l’année par de nombreuses visites. Pour n’en citer que quelques unes, après l’ouverture des jeux de la Francophonie par le Premier ministre, M. François Fillon, le président du Sénat, M. Gérard Larcher a su toucher les Libanais au cœur. Il a été suivi par son homologue de l’Assemblée nationale et également par les ministres de la Défense, des Affaires étrangères et européennes, de l’Immigration et de l’Identité nationale. L’entretien accordé le 10 août par le Président de la République sur son lieu de villégiature à S.E. M. Saad Hariri témoigne de l’engagement permanent et déterminé de la France aux côtés des institutions libanaises. Au-delà de ce soutien politique, nous continuons à aider les autorités libanaises dans leur travail de renforcement des institutions. Lors de la visite de S.E. M. Saad Hariri en France en janvier dernier, le Président de la République, M. Nicolas Sarkozy, a affirmé la disponibilité de la France à fournir tous les équipements nécessaires à l’armée libanaise et notre ministre de la Défense, M. Hervé Morin, a lors de sa visite proposé de rééquiper les hélicoptères libanais et de céder 100 missiles air-sol. La France reste résolument impliquée dans la mise en œuvre de la conférence de Paris III et les efforts libanais en matière de réformes dans le domaine des télécoms et de l’électricité devraient permettre de débourser l’aide promise.

La France demeure aux côtés de l’ensemble des Libanais. Elle demeure à l’écoute de tous. Son message ne change pas. La violence sous toutes ses formes doit être rejetée, le dialogue inter-libanais doit être encouragé et le fonctionnement normal et sans entrave de toutes les institutions garanti. Et c’est bien là que nous vous retrouvons. Je voudrais à cet égard citer le général de Gaulle dans son discours de Bayeux : « après les épreuves réapparut l’État ; l’État légitime, parce qu’il reposait sur l’intérêt et le sentiment de la nation … l’État sauvegardé dans ses droits, sa dignité, son autorité, au milieu des vicissitudes du dénuement et de l’intrigue ; l’État préservé des ingérences de l’étranger ; l’État capable de rétablir autour de lui l’unité nationale, d’assembler toutes les forces de la patrie, de porter la victoire à son terme, de traiter d’égal à égal avec les autres grandes nations du monde, de préserver l’ordre public, de faire rendre la justice et de commencer la reconstruction ».

Monseigneur, au nom de l’Ambassade de France, je vous renouvelle encore tous mes remerciements pour votre accueil et salue les nombreuses personnalités éminentes qui nous font l’honneur de leur présence aujourd’hui. Je vous remercie./.

Dernière modification : 20/08/2010

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